vendredi 31 mars 2006

C'est le bazar en ville...

Ambiance plutot sympa ce matin : en arrivant à la maison diocésaine, concert de klaxons sur le boulevard Voltaire. Les lycéens d'Hippolyte-Fontaine ont écrit sur une grande banderolle "Si vous êtes contre le CPE, klaxonnez", évidemment tous les automobilistes qui passent s'en donnent à coeur-joie.
Sympa, mais un peu inquiétant tout de même : ce soir, Chirac devrait annoncer qu'il promulguera la loi envers et contre tout ; on a l'impression que ça va jeter dans la rue des tas de jeunes qui sont maintenant surexcités. Je vais aller faire un tour en ville vers 20h30, ça devrait valoir le coup.
Place de la Banque, impossible de rentrer la voiture dans la cour : jamais je n'avais vu autant de voitures de police. Ma mère me dit qu'hier soir, jusque vers 22h, de gros cars de CRS bouchaient la rue de Suzon.

samedi 25 mars 2006

Saccages.

Je viens d'apprendre que la petite église de mon village de vacances (Saint-Genès de Blaye, en Gironde) a été saccagée : vitraux brisés, autel renversé, statues en mille morceaux, chandeliers tordus. Les coupables ont été arrêtés par les gendarmes : il s'agit de trois jeunes des environs, qui depuis des mois s'étaient signalés par des dégradations diverses (tags, effractions, vitres brisées, tentatives d'incendie) un peu partout dans le village. Ils n'avaient pas été inquiétés pour cela, et aucune suite n'avait été donnée aux plaintes déposées. Tout le village savait pourtant, les gendarmes avaient été alertés, le maire avait effectué une démarche auprès des parents, ce qui lui avait valu des lettres de menace.

Il y aurait pas mal de choses à dire sur cet épisode.
Sur les risques que courent les petites églises rurales, qui sont de plus en plus souvent la cible de vandales.
Sur les causes de cette violence envers les lieux de culte (pas seulement chrétiens bien sûr) : à force de dénoncer les religions comme des facteurs de haine, on met en danger les personnes et les lieux. Il me semble qu'on a le droit de critiquer une religion, pas de calomnier ni d'inciter à la violence.
Sur l'impunité dont ces jeunes ont bénéficié malgré les très nombreuses plaintes et les dénonciations. Notre société n'est que faussement permissive. Elle laisse passer les petits délits, mais elle sanctionne très sévèrement les fautes importantes. C'est ce qui arrivera à ces gamins, qui se retrouvent passibles de cinq ans de prison, d'importantes amendes et bien sûr qui devront rembourser les dégâts. Il y a quelques années, deux gamins avaient déjà commencé à casser des vitres un peu partout au village. On avait arrêté ce jeu idiot et les parents avaient été contraints de payer ce qu'ils devaient. Avec le recul, je me dis que c'est une chance pour eux ; ils auraient continué de plus belle jusqu'à ce que la justice passe enfin avec toute sa dureté.

jeudi 23 mars 2006

Folies.

Ce matin à la messe, une dame est arrivée en retard ; après avoir chanté à tue-tête dans le couloir, elle s'est installée bruyamment en bousculant les gens avec le gros sac qu'elle portait sur le dos, a sorti un chiffon d'un vieux sac en plastique, s'est mouchée dedans, a changé cinq fois de place pendant les dix minutes de célébration auxquelles elle a participé, s'est assise et levée à contre-temps de tout le monde, et a fini par partir avant la fin.
C'est souvent qu'on rencontre de ces gens agités, sans doute victimes d'une maladie mentale, dans l'église. Il y a une dame musulmane qui dépose aux pieds de la Vierge des dizaines de cartes postales. Un jeune homme écrit un livre que personne ne lira jamais. Une femme invite le Préfet et le maire à des célébrations aussi solennelles qu'imaginaires (une représentante de la Préfecture est venue une fois). D'autres ne font que passer à la crypte en laissant à l'entrée une intention de prière délirante.
A l'occasion de la journée mondiale des malades, qui a été consacrée à la maladie mentale, on a découvert le mois dernier qu'un cinquième de la population mondiale était affectée d'une maladie mentale.

samedi 18 mars 2006

La dame des empreintes.

A chaque fois qu'un étranger en situation irrégulière, demandeur d'asile, arrive à la Préfecture, on prend les empreintes de ses dix doigts. Ces empreintes sont aussitôt décryptées par un logiciel qui est capable de dire immédiatement le parcours effectué depuis la sortie du territoire national : les réfugiés sont ainsi suivis à la trace dans toute l'Europe.

La dame qui est chargée de ce travail à la Préfecture accomplit son office avec, paraît-il, beaucoup d'humanité. Elle s'excuse toujours, par exemple, de devoir mettre des gants : ce n'est pas par dégoût du contact physique, précise-t-elle, mais pour éviter que ses propres empreintes parasitent le relevé qui est en train de se faire.
J'admire cette femme, qui fait par devoir un travail qu'elle n'aime pas. Elle en perd parfois le sommeil, car elle connaît la détresse des personnes qu'elle reçoit ; mais elle ne peut rien faire de plus qu'y mettre toute sa délicatesse ; elle sait bien que de toute façon un autre fera ce travail si elle demande à en être déchargée.

jeudi 16 mars 2006

Le baptême est-il effaçable ?

Appelons-le Grégoire.

Grégoire a une vingtaine d'années. Je l'ai connu dans le scoutisme et à l'aumônerie ; il préparait son baptême, qu'il avait demandé à l'âge de dix ou onze ans. C'était, c'est toujours, un garçon sympathique, sportif, plutôt intellectuel dans sa démarche.
Grégoire a été baptisé à l'âge de treize ans. Il a ensuite pris de la distance, comme on dit ; d'abord vis-à-vis de l'aumônerie, puis du mouvement scout. Banal. La dernière fois que je l'ai revu, c'était à une soirée sur le bouddhisme qui l'avait beaucoup intéressée. Depuis quelques années, plus rien, sinon des nouvelles par l'intermédiaire de ses parents depuis la ville où il poursuit ses études.
L'autre jour, sa mère vient me trouver à la sortie de la messe : "Grégoire voudrait faire annuler son baptême". Je m'étonne, pose des questions : est-ce sous l'influence d'un mouvement sectaire (ce genre de demandes vient souvent, paraît-il, des Raéliens) ? Non, c'est simplement, d'après ce que je comprends, parce que cela ne signifie plus rien pour lui.

Cette histoire me pose beaucoup de questions. Non pas que je déplore le choix de quitter l'Eglise : enfin, si, je le déplore, mais c'est la liberté de chacun et je la respecte. Mais l'idée qu'on puisse être "débaptisé" ?
Que faire pour répondre à une telle demande ? C'est comme dire à quelqu'un qu'on a beaucoup aimé : "nous ne nous sommes jamais rencontrés". Pas "je ne t'aime plus", ni "tu ne m'intéresses plus", non : "On ne s'est jamais vus". Comme si on pouvait repartir vraiment de zéro. On peut être retiré des listes d'une Eglise, mais il n'existe pas de listes de l'Eglise catholique. On peut demander à être radié des registres de baptêmes. Mais faire croire, croire soi-même, que la rencontre du Christ puisse être annulée... Non pas refusée, mais annulée... N'est-ce pas se leurrer soi-même sur la vie tout court ? Entretenir avec le réel le même rapport qu'avec les rêves ou l'imaginaire - encore qu'on ne puisse même pas dire "je n'ai jamais rêvé cela", mais tout au plus "ce n'est qu'un rêve" ?

mercredi 15 mars 2006

Expulsions

Il semblerait que le jeune Iba soit de retour à Dijon... Mais sans doute n'a -t-il pas beaucoup de chances de profiter encore longtemps de l'hospitalité française.
Dans la foulée, on a appris qu'une jeune Congolaise, lycéenne à Châtillon-sur-Seine, est également menacée.
Quelques détails sur Iba :
http://sgenbourgogne.free.fr/article.php3?id_article=173#forum20
Mon idée de proposer aux paroisses d'inclure les noms des expulsés dans la prière universelle a l'air d'intéresser...

lundi 13 mars 2006

Un sur vingt-cinq mille.

Mercredi, Iba, de nationalité sénégalaise, âgé de 19 ans et inscrit en classe de Première au lycée Carnot, a été interpellé et immédiatement conduit dans un camp de rétention près de Lyon. Il fait partie des 25 000 étrangers que le gouvernement souhaite reconduire chaque année à la frontière.

Je me demande qui l'a dénoncé : un prof ? un parent d'élève ? un élève ?

J'ai une idée que je vais soumettre à mes confrères : et si, chaque dimanche à la messe, on priait pour tous ceux qui sont sous la menace d'une telle sanction, en donnant leurs noms ? Cela les transformerait en êtres humains, leur donnerait un peu de consistance. On pourrait même aller jusqu'à faire un panneau sur lequel on mettrait leurs photos, par exemple, avec un petit résumé de leurs vies...

samedi 11 mars 2006

Manifs.

Ca y est, la violence a ressurgi en changeant de quartier. Depuis trois jours c'est le campus qui est en ébullition.
C'est marrant d'écouter la radio et ensuite d'aller voir sur place comment ça se passe. Sur France-Info : "la mobilisation contre le CPE ne faiblit pas". Sur le campus, l'unanimité est moins évidente : autant de "à bas le CPE" que de "à bas la grève...".
Et puis, ça a été l'incroyable épisode de jeudi.
AG des étudiants : un amphi comble, ça ne fait jamais que 700 personnes sur 30 000 étudiants, mais, quand on sait le taux de participation aux élections universitaires... L'ambiance est électrique, des coups ayant été échangés la veille entre grévistes et non-grévistes.
Faut-il occuper les locaux ? On décide de voter démocratiquement. Oui, mais qui vote ? Suggestion du vice-président étudiant de l'Université : ceux qui ont une carte d'étudiant. Immédiates protestations de l'UNEF, car tout le monde n'aurait pas sa carte d'étudiant... Le vote a quand même lieu avec contrôle des cartes. Résultat : un vote écrasant en faveur de la libération des locaux par les grévistes.
Sans commentaire.
D'après le journal de ce matin, la tension n'est pas retombée pour autant.

lundi 6 mars 2006

Laïcité (s).

Pour ceux qui veulent continuer à réfléchir et qui ont envie de faire avancer les choses dans ce domaine, deux lectures qui me semblent assez stimulantes :
L'activité religieuse à l'Université par le frère Bernard Senelle, un Dominicain avec qui j'ai travaillé pendant neuf ans (ca fait un bail, et ça construit une solide amitié...)
Laïcité et enseignement supérieur : le guide, publié par la conférence des Présidents d'Université

Ca m'a rappelé pas mal de tracasseries dont les aumôneries scolaires ou universitaire de Dijon ont pu être victimes dans les années où j'y étais davantage investi. Interdiction d'affichage, difficultés pour occuper une salle dans les locaux, lenteurs administratives en tous genres pour faire circuler les bulletins d'inscription à l'aumônerie, par certains côtés on n'est pas loin de l'URSS sous Brejnev...
Le sommet de la bêtise a été atteint un jour où les lycéens de l'aumônerie avaient décidé d'organiser une collecte de sacs de couchage pour les sans-abris. Un enseignant a dénoncé le proviseur au rectorat parce que des affiches annonçant la collecte avaient été posées dans l'établissement ; il a fallu interrompre l'opération, qui avait plutôt attiré la sympathie de tout le monde.

jeudi 2 mars 2006

A part entière ?

Roms, Manouches, Tziganes et autres Gitans, ils sont plusieurs millions à vivre en Europe, rescapés du génocide nazi au cours duquel plusieurs centaines de milliers ont trouvé la mort, et de l'indifférence tout aussi meurtrière des Etats communistes. Une nation pour laquelle les frontières ne signifient pas la même chose que pour nous. C'est le thème d'année du CCFD (Comité catholique contre la Faim et pour le Développement) à l'intention des 11-15 ans : attirer l'attention sur des hommes et des femmes qui vivent à côté de nous et ne bénéficient pas des mêmes droits que nous.
Une invitation de plus à réfléchir sur ce que c'est qu'être un homme en France aujourd'hui : avoir une maison, un métier, être de race blanche, alors il n'y a pas de problème. Vivre dans une roulotte, avoir une origine ethnique indéterminée, parler une autre langue que le Français, alors il y a quelque chose de suspect, non ?

Pour aller plus loin :
http://www.coe.int/T/DG3/RomaTravellers/Default_fr.asp

Et aussi, pour ceux qui ont envie de se lancer dans une vraie réflexion sur la citoyenneté, le travail stimulant réalisé par des théologiens et des philosophes sous la direction de la commission doctrinale de l'épiscopat français : Communauté, communautaire, communautarisme (Documents Episcopats n°2-2006) à commander à documents.episcopats@cef.fr