Le dossier de La Vie sur les familles me vaut évidemment plein de réactions, généralement positives et bienveillantes. D'autres sont carrément négatives. Je passe sur ceux qui ne se donnent pas la peine de lire l'article en entier, et qui, parce que c'est La Vie, savent d'avance qu'ils vont y trouver quelque chose qui va leur déplaire. Mais il y a quand même des gens qui s'étonnent de voir figurer, dans ce bel échantillon de mes paroissiens, des personnes divorcées... Les divorcés seraient-ils donc exclus de l'Église ? Ne devraient-ils pas figurer sur la photo de famille, sous prétexte qu'ils donnent une image indigne du christianisme ?
Personnellement, je suis fier que chacun, là où il est, trouve sa place dans l'Église, à travers la vie paroissiale. L'Eglise est accueillante à tous, "à condition, précise le cardinal Vingt-Trois, de ne pas en rester là". C'est-à-dire : à condition de ne pas faire comme si de rien n'était, de se dire "finalement, ce que je vis, c'est vraiment génial et il n'y a aucun problème". Et donc, d'avancer, comme de toute façon tout le monde avance et cherche à se convertir. Je suis donc très fier de cette belle image de l'Église qui est donnée à la paroisse Saint-Pierre, grâce à ses paroissiens. Et je témoigne de la sincérité du désir qu'ont les uns et les autres, autant qu'il leur est possible, de suivre les conseils évangéliques.
Je suis le premier à affirmer l'importance du sacrement du mariage, à me faire le chantre des familles nombreuses (j'en viens, je sais donc de quoi je parle), à dénoncer les méfaits des divorces, des unions dites "libres", et de tout ce que vous voulez. Je n'ai aucune difficulté avec la discipline actuelle de l'Église concernant le mariage. Je mesure tout ce qu'apporte aux fiancés, y compris à ceux qui ne sont pas baptisés, une préparation au mariage qui prend au sérieux leur désir de célébrer sacramentellement leur union, et donc au cours de laquelle on n'hésite pas à lire l'Écriture, à prier, à aborder de front les questions de la foi qui rejoignent profondément celles de la vie. Il y a là un idéal, dont il faut continuer à affirmer la haute valeur morale.
Mais dire que les familles qui ne vivent pas cet idéal ne sont pas chrétiennes, cela me révolte. Or, c'est parfois ce qui est sous-entendu derrière des réactions au dossier de La Vie. Ceux qui disent cela n'ont sans doute pas lu l'Évangile, qui nous montre Jésus entouré de toutes sortes de gens, pas forcément recommandables ; qui nous parle de la Sainte Famille en des termes qui n'évoquent guère la famille "catho" traditionnelle. Ce qui fait la sainteté de cette famille, c'est qu'elle a su accueillir Dieu et donner chair à sa Parole, malgré les limites inhérentes à toute famille humaine. Ce qui peut faire de nos familles de saintes familles n'est pas leur conformité à un idéal, c'est, comme pour la famille de Jésus, la manière dont elles accueillent cette Parole et lui donnent chair.
4 commentaires:
Bon courage!
J'aime bien votre dernier paragraphe...parfois je me dis qu'on ne lit pas tous les mêmes évangiles (ou pas les mêmes passages???)
Je profite de cet article pour parler de familles qu'on oublie trop souvent: les couples infertiles. Il y a les couples sans enfants qui ne savent comment se positionner: sont-ils une famille ou non? et ceux qui ont des enfants mais sont devenus infertiles après avoir donné la vie. Ces couples voient leur projet familial momentanément interrompu voire même définitivement brisé. Comment les aider à trouver leur place dans l'Église, à les accepter avec leurs souffrances. Un certain nombre d'entre eux avaient la famille nombreuse comme idéal mais ils n'y parviendront jamais...
Pour eux, un site a été créé: Chrétiens infertiles. Pour qu'ils témoignent. Mais aussi pour faire connaître leurs souffrances, pour informer sur l'infertilité, et pour faire avancer certaines choses dans les églises chrétiennes.
Tiens, c'est une bonne idée le parallèle avec la Sainte Famille, je n'y aurais pas pensé moi-même.
Bravo et merci, Père Emmanuel, vous donnez-là l'image de l'Eglise que j'aime !
Oui vraiment merci pour ce dernier paragraphe...Je pense que Dieu aime tout le monde et que le même soleil brille pour tous. Chacun vit sa chrétienté comme il le peut, certains ont des souffrances qu'ils ne veulent pas forcément montrer par pudeur ou respect des autres et ce n'est pas parce qu'on ne se montre pas à l'église qu'on est pas chrétien...on peut aimer Jésus et prier dans le silence, on peut juste avoir envie d'être discret...J'ai des amis non pratiquants et non chrétiens, ils sont parfois plus justes et plus spirituels que certains chrétiens assidus que je connais aussi...Ne jugeons pas trop vite, Dieu sait lui...
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