lundi 29 décembre 2014

Les malentendus de la vie spirituelle (1)

Aux funérailles de ce paroissien, on a lu de beaux textes bibliques, qui parlent d'espérance, de résurrection, de vie éternelle. Un ami du défunt prend la parole, au nom de tous les amis qui sont venus nombreux. La célébration bascule alors dans un autre univers, révèle d'autres croyances : il n'est plus question de résurrection de la chair ou de rencontre avec un Dieu personnel, mais de survie de l'âme dans un océan d'amour, de dissolution dans un grand tout chaleureux, d'ondes, d'esprits, de communion psychique...

Cet épisode, tous les prêtres l'ont vécu et le vivent au quotidien, particulièrement lors des célébrations à l'église. Certains demandent à voir d'avance le texte qui va être lu, et n'hésitent pas à le corriger ; d'autres (dont je suis) essayent de trouver les points d'achoppement qui vont permettre de parler du Dieu de Jésus-Christ. Mais il faut s'y résoudre : la vie spirituelle (que l'on préfère à un "religieux" éminemment suspect) est le lieu de la subjectivité la plus absolue. Chacun se fait sa petite sauce, et considère que l'affirmation d'un dogme quelconque est une atteinte à la liberté de conscience, qui vient conforter l'idée que les religions, particulièrement si elles sont monothéistes, engendrent de l'intolérance, voire de la violence. La vie spirituelle est le lieu de tous les malentendus.

Le premier de ces malentendus tient au vocabulaire. Le mot même de "spiritualité" semble porter en lui l'affirmation de la force de l'esprit sur la matière. Il sous-entend qu'il existe, quelque part, un monde immatériel, invisible, et que le divin relève de cette réalité-là. Le "royaume de Dieu", dont parle si souvent Jésus, n'est-il pas ce monde de l'esprit ? La vie spirituelle serait-elle une porte d'entrée dans cet autre univers ?  Ne faut-il pas, pour y accéder, développer les forces insoupçonnées recelées par notre esprit, en s'aidant de sagesses millénaires que notre époque découvre avec fascination ?

Pour Jésus, pour l'Evangile, il y a bien, en l'homme, un esprit, une âme, une réalité qui dépasse ce qui est matériel et visible. Mais la vie spirituelle n'est pas la vie de cet esprit-là (le nôtre). Elle est la vie de l'Esprit-Saint en nous, ce qui n'est pas la même chose. Elle est accueil d'une réalité autre qui vient prendre chair en nous, s'y incarner au sens propre. A cet Esprit, l'homme est invité à donner sa propre chair : ce n'est plus nous qui décidons, c'est Dieu qui prend les commandes. La vie spirituelle consiste d'abord à faire toute sa place à l'Esprit-Saint, à nous laisser transformer par lui, à nous mettre à l'école de Dieu. Le christianisme, qui est ancré sur la prédication de Jésus, n'est pas un idéalisme ; il adopte au contraire la posture du réalisme le plus ingrat. Peut-être est-ce l'une des raisons qui le rendent si difficile à vivre.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

A la fin d'une célébration de funérailles ,j'ai entendu ,catastrophée ,ce genre de discours tenu par un membre de la famille.Ridiculisant toute la célébration . Si la famille intervient au début, ensuite le célébrant peut rectifier c'est à dire évangéliser . L'église est le lieu privilégiée pour l'évangélisation . MADO