dimanche 24 avril 2011

Christ est ressuscité !


Ce matin, grand soleil sur la place Wilson, sonneries de cloches à toute volée, sous le kiosque voisinent pasteurs, archevêque et pope : Christ est ressuscité, l'annonce en est faite dans toutes les langues de la terre, Alleluia !

samedi 23 avril 2011

Pipi caca.

Piss Christ, ou comment une obscure galerie de province fait parler d'elle à propos d'une exposition, et de son œuvre phare qui représente, comme nul ne l'ignore plus maintenant, un crucifix immergé dans un bocal d'urine (à la curieuse couleur orangée, mais le titre de la photo ne laisse pas de doute sur la nature du liquide). L'artiste proteste de sa bonne foi, se dit chrétien convaincu, et donne des explications, indispensables pour comprendre son intention : il s'agit de montrer que les outrages dont a été victime le Christ n'ont pas cessé depuis deux millénaires, et que cela n'empêche pas la Croix de rayonner. Nous sommes donc en face d'une œuvre pédagogique. Le problème - enfin, l'un des problèmes - est qu'il y ait besoin de tant d'explications pour comprendre de quoi il s'agit : car, à première vue, on comprend juste le contraire.

Certes, une œuvre d'art n'est pas une image publicitaire, et nos esprits enténébrés par des années de dictature communicationnelle ont besoin d'un peu de lumière pour avoir accès à toute son intelligence. Certes, comme le font remarquer les défenseurs du photographe, notre difficulté vient aussi du fait que les sujets religieux sont beaucoup moins traités qu'autrefois par les artistes contemporains : a-t-on oublié le scandale qu'a suscité la nudité des protagonistes du "Jugement dernier" de Michel-Ange ? C'est vrai, enfin, qu'un artiste a droit à la liberté d'expression, au moins autant que chacun d'entre nous. Il n'y aurait donc pas lieu de protester.

Que penser, donc, des réactions de rejet, certaines violentes, suscitées par cette installation ?

Il y a eu la manifestation organisée par un groupuscule intégriste, abondamment médiatisée et ridiculisant une fois de plus les catholiques. Mais il y a, aussi, le malaise éprouvé par tant d'autres : car, explication ou pas, cette image a été réalisée en plongeant dans l'urine l'image du Christ sur la Croix. Aurait-on osé le faire avec l'image d'autres morts ? Bien sûr que non. Mais, là, c'est permis. Alors, pour de plus en plus de chrétiens, c'est le ras-le-bol : l'impression, justifiée ou non, que le christianisme peut être traîné dans la boue sans que personne ne dise rien, qu'on peut mentir autant qu'on veut sur l'Église et l'Évangile sans jamais être contredit par qui que ce soit. Les catholiques deviennent inquiets : ils se demandent si, demain, ils auront toujours le droit de célébrer le culte dans leurs églises, s'ils continueront à pouvoir assurer la vie des aumôneries dans les hôpitaux et dans les prisons (puisqu'elles sont, dans l'enseignement public, en voie de disparition). Il faut, sans doute, être chrétien aujourd'hui pour comprendre que l'anti-christianisme n'est pas une menace imaginaire. En ce sens, l'affaire d'Avignon a valeur de symbole : elle dit l'inquiétude des catholiques devant ce que beaucoup comprennent comme une volonté d'éradiquer les religions de la vie commune.

mercredi 20 avril 2011

Abidjan : les convulsions de l'après-Gbagbo.

A Abidjan libérée de son tyran, c'est une terreur d'un nouveau genre qui s'est abattue : l'épuration vise les étudiants, soupçonnés d'être des suppôts de l'ancien régime - Charles Blé Goudé, l'ancien bras droit de Gbagbo, avait fait des universités l'un des principaux lieux d'agitation gabgbiste, et constitué des milices qui laissent aujourd'hui un affreux souvenir.

Voici ce que raconte François, dont j'étais sans nouvelle jusqu'à ce jour :

Avant-hier, quatre personnes armées sont arrivées à la maison. J’étais avec David, bien sûr.

Et là, ils ont dit qu'ils cherchent les étudiants qui se sont cachés à la maison.

On a dit qu'il n'y avait pas d'étudiant, et ils on dit que vous bien sûr ; donc ils m'ont pris avec David dans l'arrière de leur 4*4

Je priais dans mon cœur, je demandais a Dieu de nous sortir de cette situation comme il a secouru les fils d'Israël dans la détresse. Nous sommes arrivés au cimetière.

Ils nous ont fait descendre, et là leur chef me demande :

« tu crois en Dieu, fais ta dernière prière »

Je lui ai dit « ok, accorde moi une minute ».

Pendant que je priais, un cargo plein d'étudiants est arrivés, et nous ils nous ont demandé de partir.

Voila comment on a échappé à la mort.