jeudi 15 novembre 2012

Jamais devant les copains.

L'enseignement catholique permet quelque chose que les écoles laïques interdisent : on peut aborder avec les élèves les questions de foi, en-dehors de tout prosélytisme. Au lycée Saint-Joseph de Dijon, il existe un "temps d'échange" hebdomadaire, animé par divers intervenants sur un tas de sujet, auquel toutes les classes participent, et dans lequel l'aumônerie intervient à trois reprises, sur le sujet : "À quoi ça sert de croire ?"

C'était mardi dernier. Je rencontrai une classe de seconde, qui avait discuté la fois précédente de ce en quoi ils croient. Je connaissais les réponses par Dominique, l'adjointe en pastorale : tous croient en leur famille, en leurs amis, certains en des valeurs, un seul en Dieu. Comme par hasard, c'est aussi le seul musulman de la classe, qui me dit au cours de la discussion n'avoir jamais rencontré un seul chrétien de sa vie.

Après la séance, Dominique me dit : Un Tel là au fond, il vient très souvent à l'aumônerie ; tel autre a fait sa confirmation l'an dernier ; un autre encore est un pilier du groupe de jeunes de sa paroisse. Aucun n'a fait part, non seulement de ses convictions, mais même de son expérience de vie en Église.

dimanche 4 novembre 2012

Fin de série

Voilà, c'est fini. Les flics ont tout nettoyé, ce filou de père supérieur à été viré par l'autre crapule en soutane rouge, et Dominique est enfin aux manettes pour remettre de l'ordre dans le chaos. Le séminaire est définitivement (?) parti en vrille, mais sur les cinq séminaristes, trois finalement ont tenu le coup, et les deux autres n'ont sans doute pas dit leur dernier mot. La deuxième saison est paraît-il déjà dans les tuyaux, on l'espère mieux documentée que la première, mais on se doute tout de même que le bazar va revenir, tant il semble appartenir à l'essence même de l’Église.

Comme tout a déjà été à peu-près dit sur le caractère caricatural des personnages et des situations, voire la naïveté de certains dialogues (ah, cette tête d’œuf de secrétaire qui veut envoyer le Secours catholique nettoyer les ordures devant la basilique, mais où a-t-il trouvé une idée pareille ?), je m'abstiendrai d'en rajouter une couche. Mais quand même : en une seule année, il s'en est passé plus dans ce séminaire que dans toute une vie de prof. Ils en auront des choses à raconter aux jeunes, les Guillaume et compagnie, quand ils seront de gros curés repus de messes, au cuir tanné par les enterrements.

Tout de même, une question : pourquoi tout le monde est-il si triste ? Car autant que je m'en souvienne, les plus beaux fous-rires de ma vie, c'est à la chapelle du séminaire, dans la salle à manger, pendant les cours aussi, que je les ai piqués... J'en témoigne ici : le séminaire ne paraît triste qu'à ceux qui n'ont rien à y faire.

Alors, comment se fait-il que, comme quelques centaines de milliers de téléspectateurs, j'aie pris autant de plaisir a suivre cette intrigue abracadabrante ?

D'abord parce que, sans être génialement réalisée, la série se laisse regarder, les acteurs sont bons, et les personnages finalement plutôt sympathiques.

Mais aussi, parce que, au fil des épisodes, j'ai cherché, comme tout le monde, à répondre à deux questions.

La première : comment un Église aussi débile et gouvernée par de pareils incapables fait-elle pour afficher depuis deux mille ans une santé aussi éclatante ? Entendons-nous bien : Benoît XVI n'est pas Grégoire XVII, le président des évêques de France ne pense pas qu'à sa soutane, bref tout ce qui est dit dans la série relève de la fiction. Mais bon, dans la vraie vie, ils ont aussi leurs défauts. Quant à l'Eglise, elle n'est pas en super-forme, mais elle est toujours là. Alors, derrière le roman, le message est assez juste : là où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie, et si l'Eglise survit à toutes ces turpitudes, c'est qu'il doit bien y avoir autre chose derrière.

La deuxième : qu'est-ce qui fait que de jeunes hommes, que rien ne distingue en apparence d'autres jeunes de leur génération, continuent à vouloir se consacrer à Dieu dans le sacerdoce ? C'est pour moi la grande réussite du film : ne pas se prononcer là-dessus. Reprendre, à son insu peut-être, le "tout est grâce" de Thérèse et de Bernanos. Car finalement, malgré (ou avec, ou à cause de ?) tout ce qui leur arrive, leurs péchés, leurs misères, leurs erreurs de parcours, on sent bien qu'à la fin de la Xième saison, ils vont y arriver, les gars, à l'ordination. Et qu'ils vont nous faire de bien braves curés. Alors, le prêtre que je suis, et tous ceux que je connais, reconnaissent en eux quelque chose de leur propre histoire : quand Dieu a quelque chose dans la tête, pas facile de le faire changer d'avis.