mardi 22 juin 2010

Ce n'est qu'un jeu.

"Ce n'est qu'un jeu", disait ma grand-mère lorsque nous nous disputions avec mes cousins pour savoir qui avait triché et qui avait vraiment gagné. Peut-on encore dire cela à des enfants aujourd'hui, alors que le jeu rapporte des millions d'euros à ceux qui s'y adonnent, et que les frasques adolescentes des champions font la Une des médias les plus austères ? Comment expliquer, quand les collectivités publiques s'apprêtent à investir des sommes énormes pour satisfaire à ce qui est de l'ordre de la pulsion incontrôlée, que le monde réel est ailleurs, et que la richesse des nations ne se bâtit pas autour des stades de foot ?

L'amnésie dont souffre notre société, volontiers oublieuse de son histoire, n'aide pas à porter un jugement serein sur ce qui est en train de se passer. Il serait bon, pourtant, de rappeler qu'un empire passé assujettissait ses peuples en lui offrant des jeux ; et qu'un régime de chez nous s'est écroulé entre autres à cause de la passion du jeu, qui contraignit l'épouse du souverain à accepter les dons d'un couple d'escrocs.

C'est pourtant vrai, ce n'est qu'un jeu. Ce n'est pas la France qui perd, mais une poignée de millionnaires qui seront de toutes façons toujours aussi grassement payés, et dont on semble découvrir aujourd'hui la grossièreté. Et si nous perdons, c'est de voir autant d'argent gaspillé de cette manière, alors que nos finances sont au bord de la banqueroute et que des gens, chez nous, ne vivent pas dans des conditions dignes d'un pays civilisé. Encourager le sport, c'est bien, évidemment : mens sana in corpore sano. En faire un moyen de gouvernement, c'est de la démagogie, et c'est catastrophique pour l'avenir.

2 commentaires:

P. David Journault a dit…

Tout simplement, bravo !

Jérôme a dit…

Très bel article. Félicitations !!!