vendredi 11 juin 2010

L'éclatement de la bulle sacerdotale.

Il y a eu la bulle Internet, la bulle immobilière, les bulles islandaise et grecque (qui préfigurent, paraît-il, la bulle des Etats surendettés). A Dijon (Cote d'Or), une autre bulle vient d'éclater : la bulle sacerdotale.

En quelques mois, cinq prêtres en activité se sont retrouvés frappés par de sérieux problèmes de santé ; deux d'entre eux ont moins de cinquante ans. On doit faire appel, pour que la mission soit encore assurée, à des prêtres retirés et parfois eux-mêmes de santé fragile. Quant aux "encore jeunes" - ce qui signifie moins de 75 ans, âge où les curés prennent leur retraite - les charges qui pèsent sur eux ne cessent de croître, car s'il y a moins de monde à la messe le dimanche, il y a toujours autant de choses à faire dans l'Eglise. C'est rassurant dans un sens : ça veut dire, comme disait Georges Suffert, que "le cadavre de Dieu bouge encore". C'est inquiétant pour l'équilibre et la santé de ceux qui restent.

Certes, il y a eu depuis vingt ans d'énormes efforts de faits : réorganisation des territoires, appel à des baptisés pour exercer des missions jusqu'alors dévolues aux prêtres, développement du diaconat. Mais l'Eglise catholique ne peut être une Eglise sans prêtres. Alors, on continue à se bercer d'illusions : "On ne sait jamais, les vocations vont peut-être repartir" ; "Pourquoi ne faites-vous pas appel à des prêtres retirés ?" ; "Il faut inviter des missionnaires africains, il y en a beaucoup". Voilà des phrases que j'entends souvent dans la bouche de bons chrétiens. C'est se bercer d'illusions : les vocations ne vont pas repartir de sitôt (il faut dix ans pour faire un prêtre, on sait donc qui sera là dans dix ans) ; on fait déjà appel au-delà du raisonnable aux prêtres retirés ; quant aux prêtres africains, ils sont 29 000 pour tout le continent, alors que la France en compte 20 000... Et on a besoin d'eux là-bas aussi.

Il y a, malgré tout, une différence de taille entre les clergés français et africain : ici, la moyenne d'âge excède 70 ans ; là-bas, elle est inférieure à cinquante. C'est entre ces deux chiffres que s'est entretenue la bulle sacerdotale : l'illusion que nous allions continuer à vivre sur le même rythme.

21 commentaires:

Marc a dit…

Ce phénomène frappe ton Diocèse, mais c'est pareil partout.

Par exemple dans mon doyenné, si un seul prêtre a un pbs de santé, ce qui est inexorable vu leurs âges, et tout va disparaître, laïcs ou pas.

Mais la prochaine bulle, c'est pas la tension existante entre des demandes liées aux sacrements (mariages et baptêmes) et le manque de moyens pour assurer cette mission ?

Après la bulle sacerdotale, quid de l'explosion de la bulle sacramentelle ?

Tigreek a dit…

Je ne peux que vous souhaiter bon courage et prier pour votre santé physique et morale... et aussi pour les vocations (même si ça n'est pas immédiat).

Je sais que je vais avoir l'air d'un troll, mais... et si la prêtrise était ouverte aux femmes ? L'Eglise réformée a ouvert le ministère pastoral aux femmes après la seconde guerre mondiale. Aujourd'hui, 40% des pasteurs sont des femmes. Dans l'Eglise catholique, combien de soeurs ou moniales sont entrées dans les ordres car c'était leur façon de donner leur vie à Dieu ? Combien serait devenues prêtres si elles en avaient eu la possibilité ? Je ne dis pas que ce serait une solution miracle... Je dis juste que pour le moment, L'Eglise se prive statistiquement d'environ la moitié des vocations sacerdotales...

Acer11 a dit…

Quelques réactions sur le vif, un peu en vrac :

Ça fait des années qu'on parle de cette bulle. Mais elle est encore là, tant il est difficile de renoncer à un mode (monde ?) de fonctionnement. Malheureusement nous n'avons pas encore fini d'imploser : à échéance de 5 ans, des diocèses se préparent à fonctionner avec moins de 12 prêtres. D'où la question de Marc, fort juste et préoccupante.

Certes des efforts ont été faits, des renoncements aussi. De nombreux prêtres et d'évêques sont admirables de dévouements. Hélas nous planifions la crise sans voir le bout du tunnel. Certainement nous essayons tout ce que nous pouvons en nous efforçons d'écouter le Seigneur, car Lui seul connaît les chemins du renouveau chrétien.

Sur ce chemin il faut reconnaître que nous manquons de vrais prophètes (ou que nous ne les écoutons pas, ce qui n'est pas exactement pareil).

« l'Église catholique ne peut être une Église sans prêtres ». C'est vrai. Et alors, vous en tirez quoi ? Qu'y a-t'il après l'éclatement d'une telle bulle ? C'est juste un moyen pour dire que la réalité nous rattrape ? C'est vrai qu'il faut s'en rendre compte pour essayer de réagir, ou en d'autres termes, de se convertir.

Y'a même plus assez de prêtres pour faire tourner la barque de Pierre. C'est vraiment grave. Et pourtant ce n'est qu'un symptôme. Nous n'avons pas, nous n'avons plus le goût de Dieu. Voilà, à mon sens, le diagnostic.

Avons-nous un goût de Dieu contagieux ? Si oui, Dieu est en nous vivifiant. Si non, notre christianisme est peut-être encore vivant, on peut dire qu'il a vécu. Le reste, c'est l'intendance. Certes à ne pas négliger, car c'est le quotidien, il faut gérer...

Bon, en écrivant cela je me paye un peu de mots. Mais au-delà ce ce qui est ici critiquable, n'est-ce pas dans cette direction qu'il faudrait chercher ? Question de goût ?

Bien fraternellement envers ceux qui ont les mains dans le cambouis.

Jastrow a dit…

« L'illusion que nous allions continuer à vivre sur le même rythme » existe-t-elle vraiment ? Tout le monde sait qu'il manque de prêtres : les laïcs impliqués dans la vie de la paroisse aussi bien que les « simples » paroissiens dont la mère sera enterrée en l'absence de prêtre, faute de main d'œuvre. J'en ai vu des ADAP dans ma paroisse de campagne quand j'étais gosse : le curé avait 17 paroisses à sa charge. Il est maintenant à la retraite, mais célèbre encore la messe de temps en temps à l'église paroissiale. Il a été remplacé par un oblat bénédictin en paroisse, puis par un prêtre africain (kenyan je crois).

Le constat est, je crois, partagé par tous. Pour les solutions, en dehors de prier pour les vocations, je ne vois guère que l'éducation : on trouve encore des familles qui comptent un prêtre par génération. Comment font-elles ?

do a dit…

c'est drôle, moi qui suis pourtant pessimiste habituellement, là, je le suis moins: les campagnes se vident de prêtres comme elles se vident de tout, quant aux villes, une seule messe par ville suffirait, il n'y a bien souvent qu'une seule zone commerciale, un seul hôpital,... et des transports pour y aller...
pourquoi pas une seule cathédrale, ou une communauté? Pourquoi garder 5 messes à 3/4 vides à presque la même heure? Dans ma ville, c'est encore le cas.

Je ne peux pas penser que Dieu n'aie pas le bras assez long!

Je crois au contraire que quelque chose d'imprévisible, se prépare, quelque chose qui ne correspond pas à nos vues, alors il faudra qu'on soit pauvres pour pouvoir l'accepter: je ne crois pas un seul instant que Dieu n'aie pas prévu des semences d'éternité pour ces enfants tellement blessés que ce siècle a enfantés. Des jeunes issus de parents séparés, placés dans des collectivités à des âges tellement précoces, voués aux sciences occultes ou au new-âge faute de véritable spiritualité, voués à la drogue pour supporter leur quotidien sans amour vrai, leur affectivité abandonnée à l'égoïsme des prédateurs...

Non, je ne peux pas croire que ce Dieu, qui nous dit en cette fête "Maintenant, j'irai moi-même à la recherche de mes brebis" ne le fasse pas!

Mais ça passera peut-être par une sorte de "destruction du Temple" comme en 70, (je veux dire 0070), pour que naisse une communauté vivante, charitable, croyante, unie, que peut-être les tenants des Temples actuels persécuteront même quelques temps, au début, tellement ça les surprendra...


On voit des choses d'une ampleur incroyable se dessiner. des ponts se construire entre des églises séparées, des relations se nouer entre des religions ennemies, des solidarités mondiales s'organiser: à mon avis, on ne supporterait pas d'entrevoir déjà ce qui nous est préparé. (enfin, le chemin pour y arriver, surtout).

Moi, je verrais bien des pasteurs et des diacres, unis, pour les baptêmes, les mariages, des laïcs pour les obsèques, des communautés pour l'accompagnement, et laisser les prêtres vivre le coeur de leur ministère, au maximum, en les soulageant du reste. Aujourd'hui, avec internet, on a accès à des enseignements, des informations, des prestations de toutes sortes que des gens laissent gratuitement à la disposition des autres, par pure envie de partager, comme ce blog, d'ailleurs: Que deviennent nos anciennes structures de caté, de formation, d'information, si les nouvelles prennent leur place? Et ainsi pour beaucoup de choses.

pour moi, la seule chose vraiment dangereuse, c'est le péché, celui de l'Eglise, comme le dit le Pape, et celui de ses détracteurs, qui à eux deux risquent de déclencher des guerres civiles un peu partout.

Mais on n'est pas dans la situation des pays sans prêtres pour cause de distance ou de persécution (même si ça peut arriver). On est dans un pays où l'égoïsme a coupé tous les liens, et où des voitures font 20 km avec 4 places vides pour aller à la messe en laissant 4 personnes âgées sur le chemin: le problème n'est pas la distance!

Le travail, le mariage, posent le même problème que le sacerdoce: personne ne veut s'engager! on veut que les autres s'engagent, mais pas nous. On veut + d'autorité, mais pour les autres, pas pour nous!
le problème, c'est l'égoïsme, le manque de charité;
mais comme ça vient de l'orgueil lié à la richesse, à mon avis, ça ne devrait plus trop durer...

Emmanuel Pic a dit…

@ Marc :
en ce qui me concerne, le problème c'est plutôt les obsèques. Evidemment on peut dire "laissons-les célébrer par des laïcs", mais c'est un peu compliqué : d'abord parce qu'il est difficile de trouver des personnes prêtes à assumer cette mission, ensuite parce que les familles ne sont pas satisfaites.
Pour les sacrements : je ne suis pas submergé par les demandes de mariages... Quant aux baptêmes, il est assez facile de les regrouper. Mais les préparations et les célébrations de ces sacrements sont une occasion unique de rencontrer une foule de gens et de leur parler de Dieu ; pour tous, c'est une découverte de Dieu et de l'Eglise. Bref, un moment idéal de catéchèse que je ne suis pas prêt de laisser tomber.
L'appel aux diacres me paraît une piste intéressante. Malheureusement, beaucoup de mes confrères ne jouent pas le jeu, car ils considèrent ce ministère comme insignifiant. Du côté des diacres eux-mêmes, leur formation fait peu de place à la dimension cultuelle ; mais ils se plaignent souvent qu'on ne fasse pas assez appel à eux pour cela.

Emmanuel Pic a dit…

Non, tout le monde ne sait pas qu'on manque de prêtres. La plupart des gens que je rencontre pensent qu'il y en a toujours autant que dans leur enfance. Ils pensent aussi que nous sommes fonctionnaires, et que les frais du culte sont pris en charge par l'Etat.

Mais même parmi les chrétiens qui savent qu'il n'y a pas suffisamment de prêtres, la plupart sont incapables d'en tirer toutes les conséquences. La messe qu'on doit supprimer, ce n'est jamais celle à laquelle je vais. La directrice de la maison de retraite insiste pour qu'un aumônier vienne chaque dimanche. Les infirmières téléphonent pour demander l'extrême-onction (qui n'existe plus, soit dit en passant), et ne reconnaissent pas l'existence d'une équipe d'aumônerie. Et quand on appelle un laïc à un service, c'est toujours compris comme une aide pour le prêtre qui est surchargé, et rarement d'emblée comme un service qu'on rend à tout le monde par le biais de l'Eglise.

D'autre part, "supprimer des messes" de manière drastique n'est pas toujours une bonne idée. D'abord, parce que l'eucharistie est le coeur de la vie chrétienne. Ensuite, parce que la messe est un lieu essentiel de l'expérience chrétienne et de la rencontre avec Dieu. Beaucoup de gens, de jeunes en particulier, me disent combien la fréquentation de l'eucharistie a été le lieu de leur redécouverte de Dieu. Et cela se déroule parfois dans des conditions très étonnantes, au cours de célébrations parfaitement atones et animées par des vieilles dames...

Ne rêvons pas : la solution ne sera pas d'appeler des femmes au ministère. On ne parle même pas pour le moment d'appeler au sacerdoce des hommes mariés ! Mieux vaut donc être réaliste. Je vois dans l'appel au ministère diaconal - ce qui est un pléonasme, puisque le diaconat est précisément le ministère - une piste plus que prometteuse pour l'avenir. Mais il est grand temps d'y consacrer davantage d'énergies. Je pense aussi qu'il est fondamental de former des baptisés à l'exercice de missions ecclésiales. Mais, dans ces deux domaines, tout repose sur les prêtres, qui connaissent les personnes susceptibles d'être appelées ; et ce que je constate malheureusement, c'est que cet appel est loin de se faire partout.

Jastrow a dit…

Mon père, vous vivez en ville. Ça explique. Dans ma paroisse parisienne, il y a plusieurs prêtres pour la même église. À la campagne, on fait tous des kilomètres en voiture pour aller à la messe – au moins, c'est une occasion de se rencontrer entre habitants de différents villages... Certaines églises paroissiales ne voient une messe qu'une fois par an ou moins, pour une occasion bien spéciale (pèlerinage local, fête du saint patron). Le prêtre qui vient célébrer doit parfois faire plus d'une demi-heure de route (en montagne). Difficile de ne pas se rendre compte du manque de prêtres.

Vous dites : « Et quand on appelle un laïc à un service, c'est toujours compris comme une aide pour le prêtre qui est surchargé ». C'est aussi de la faute des prêtres. Combien voient encore le laïc comme de la main-d'œuvre supplétive, qui vient pallier le manque de prêtres ? Quand j'étais enfant, un second prêtre est arrivé dans ma paroisse (à la campagne) pour des vacances ; le curé a retiré leurs tâches habituelles aux laïcs, avec le discours : « maintenant qu'il y a un prêtre, on n'a plus besoin de vous ». Ce n'était pas fait méchamment, mais des gens (dont mon père) en ont été blessés. Mon curé oblat bénédictin avait beaucoup de qualités, mais pour lui les prêtres et surtout les moines étaient bien au-dessus du commun des laïcs. Ailleurs, quand un laïc marié a été ordonné diacre, le curé a dit « c'est bien, comme ça il y aura quelqu'un pour servir la messe ». Bref, dans mon expérience personnelle, ce sont plutôt les prêtres qui ne s'aperçoivent pas de la « bulle sacerdotale ».

Emmanuel Pic a dit…

@ Jastrow :
je suis bien d'accord avec vous... Ne mettons tout de même pas tous les prêtres dans le même panier ! Mais il est évident, sans chercher à savoir qui a eu tort ou qui a eu raison, que les prêtres (et je me mets dans le lot) ont leur part de responsabilité dans les difficultés actuelles.

manuel a dit…

aujourd'hui, fête du coeur Immaculée de Marie, j'ai vécu ce matin l'éclatement de la bulle ... du blanc kass local.
Je m'explique : le village de St Seine sur vingeanne du XIIe s restaurée par des Compagnons, nous a appellés, nous habitants du village, jeunes, vieux et même 2 chiennes, à passer les poutres (pas celle que l'on voit dans l'oeuil du voisin) en chêne du pays pour refaire le plancher du clocher.
De la poussière, quelques coups de gueule, des mains aimantes pour apprendre à un jeune à se servir d'un pied de biche, quelques bières plus tard...Jésus était là.
Cela se finit comme dans toute fête gauloise par un "banquet" où les bulles du petit vin blanc local (un aligoté ?) pétilla.
Alors, une bulle qui pète, sacerdotale, financière, footbalistique...reste les bulles qui pétillent dans les yeux des Hommes.
PS: la pauvre statue de Marie a bien failli être renversée par un maladroit. Mais le Seigneur veille. Et puis, ce n'est qu'une pierre...et sur cette pierre le Seigneur nous a envoyé méditer sur son Espérance dans la Vie.

Jastrow a dit…

Je n'aurais pas dû écrire « la faute de » : il est difficile pour tous de changer de repères et je ne voulais pas jeter la pierre à un « camp » ou l'autre. Nous sommes tous dans le même bateau !

Anonyme a dit…

Jeannine COMTE
à Emmanuel Pic

Prévisible cette situation !
Et sans jouer les oiseaux de mauvaise augure dans 5 ou 10 ans ce sera pire encore. C'est mathématique.
La sonnette d'alarme a été très largement tirée dans de nombreux endroits. Laïcs en mission et prêtres sont à bout de force et n'arrivent parfois plus à se comprendre faute de tirer ansemble dans la même direction.
Vocation sacerdotale : ministère au SERVICE des baptisés trop souvent vécu comme une autorité sur le peuple des baptisés.
Vocation baptismale : devenir par son baptême Prêtre, Prophète et Roi !
Vocation souvent niée et oubliée.
Pourtant le tronc commun en Eglise est notre baptême , notre foi au Christ et l'Esprit Saint sait peut-être très bien ce qu'Il fait en nous emmenant dans ces situations de pauvreté.
Pourquoi ne pas s'appuyer TOUS sur ce socle commun très sûr de notre baptême ?
C'est ce qu'essaie de faire la Conférence catholique des baptisés de France.
Malheureusement ce groupe très catholique, très engagé et tourné vers l'avenir n'est guère soutenu par l'Eglise locale et ses prêtres ! Dommage, pour une fois où il est question de débats constructifs et inventifs pour notre Eglise d'aujourd'hui et de demain. Est-on à ce point peureux et frileux devant l'avenir ? Mais ce n'est pas le moment d'avoir peur. Christ est ressuscité !La Vie aura le dernier mot.

Anonyme a dit…

D'après des témoignages de prêtres âgés , la plupart d'entre eux avait eu la vocation avant l'âge de 12ans .
Vocation confirmée par l'appel de leur curé .
"Qui est ce type ?" me demandait un jour un enfant de mon groupe de caté,en désignant du doigt le prêtre de la paroisse qui passait par là. Il ne faut pas perdre l'Espérance . Un église DE Marseille qui était menacé de démolition ,faute de paroissiens, reprend vie de façon très spectaculaire . MADO

Emmanuel Pic a dit…

@ Jeannine :
Merci de votre commentaire, heureusement il y a de nombreux endroits où laïcs en mission et prêtres tirent dans la même direction.

Quelques précisions :

- La vocation sacerdotale n'est pas un service, mais une vocation, c'est-à-dire un appel de Dieu, médiatisé par l'Eglise. Je pense que vous voulez parler du ministère sacredotal. Ce dernier n'est pas d'abord un service des baptisés, il est d'abord un service de tous : il est l'exercice du ministère de l'Eglise, et suppose donc, évidemment une certaine forme d'autorité. Bien sûr, cela ne signifie pas autoritarisme.

- Pour ce qui est du sacerdoce commun (baptismal), nous devons toujours avoir présente à l'esprit la phrase du concile : il y a avec le sacerdoce ministériel une différence de nature et pas seulement de degré. On ne peut donc construire toute une ecclésiologie uniquement sur le sacerdoce commun.

- La CCBF est un mouvement fort sympathique, mais il n'est pas le seul lieu où se réfléchit l'avenir de l'Eglise. Et ce qui me frappe en ce moment, c'est bien la diversité des analyses et la dispersion des initiatives... Je trouve intéressante leur intuition, mais je suis critique sur un point : la priorité n'est pas, à mon sens, la réforme institutionnelle de l'Eglise, mais la redécouverte du caractère essentiel du service de l'humanité auquel nous somme conviés par l'Evangile. C'est à ce prix-là que nous pourrons espérer dépasser les conflits de personnes auxquels vous faites allusion.

Pierre-Yves a dit…

Bonjour,
J'ai lu avec attention ce billet et ses commentaires. Je suis moi-même un laïc engagé par l'Eglise de mon canton (Suisse). Je travaille à plein temps dans une Equipe Pastorale composée de 3 prêtres, 4 laïcs permanents et 3 bénévoles. Cette EP est au service de 4 paroisses pour un total d'environ 12'000 catholiques.

Nous ne souffrons encore pas trop du manque de prêtres. Je sais que certains d'entre-vous, surtout en France, vont sourire en se disant que nous sommes bien assez comparé à leur situation. Ce que je voudrais dire se situe ailleurs.

Nous avons pris l'option de fonctionner à 4 pour les funérailles. Les 3 prêtres et moi. Concrètement, la personne qui sera contactée par les pompes funèbres le sera en fonction du jour où auront lieu les obsèques.

Nous avons mis sur pied toute une communication pour expliquer aux catholiques de notre région qu'il ne s'agissait pas de funérailles de 1ère catégorie (avec un prêtre) et de seconde catégorie (avec un laïc). Bon, nous n'avons pas utilisé ces termes, mais nous avons communiqué que l'Eglise du lieu procède ainsi.

D'une manière générale, les familles demandent explicitement la messe environ 1 fois sur 7, 1 fois sur 10. Mais cela ne change pas l'approche. Si je suis demandé pour rencontrer une famille, et qu'elle me demande la messe, je trouve ensuite un prêtre qui sera présent uniquement pour cela, et c'est moi qui rencontre la famille et prépare l'enterrement avec eux. C'est également moi qui prend la parole lors de la célébration.

Cela ne fonctionne que parce que nous nous faisons confiance mutuellement les prêtres et moi. Ensemble, nous avons pris une option, afin de permettre un meilleur service au peuple de Dieu, avec une vision d'avenir.

Voilà, je voulais juste faire part de mon expérience ici en Suisse. Bonne chance à vous.

Anonyme a dit…

Situation prévisible depuis longtemps!
Quelques pistes, dans l'immédiat.
Faire sortir les ordres contemplatifs de leurs cloitres et les impliquer aux cotés des prêtres.
Dans l'avenir consacrer les femmes et autoriser le mariage des prêtres.
Permettre d'être prêtre une partie de sa vie sans voeux définitifs.
On peut changer au cours d'une vie et se consacrer à l'église dix ou vingt ans serait déjà louable.
Et bien évidement impliquer les laics aux coté des prêtres, mais c'est déjà le cas.
J.C.

Emmanuel Pic a dit…

@ J.C. (qui n'est pas Jésus Christ):

Les pistes que vous évoquez le sont depuis pas mal de temps déjà. Je me permets de vous donner mon opinion là-dessus :

- "Faire sortir les ordres contemplatifs de leurs cloîtres" : c'est ce qu'avait fait la Révolution de 1789. J'aime beaucoup les moines, mais je pense qu'ils feraient à peu-près tous de mauvais curés. Chacun son charisme. Et quand on aura vidé les monastères, la question continuera à se poser.

- Consacrer les femmes et autoriser le mariage des prêtres ? ce sont deux choses différentes. L'une et l'autre sont exclues pour le moment, on peut le déplorer mais c'est comme ça. Mon problème à moi n'est pas de changer l'institution, mais de chercher comment faire dans la situation présente : comme le disait Keynes dans un autre domaine, tout cela est bien pour le long terme, le problème avec le long terme c'est que nous serons tous morts...

- Etre prêtre sans voeux définitifs ? Pour moi, c'est inimaginable. Etre prêtre est inséparable d'un don de soi-même à Dieu, et quand on se donne complètement ça ne peut pas être seulement pour un temps donné. Un prêtre, c'est d'abord un homme qui a fait une expérience particulière de Dieu. Cette expérience le marque pour toute sa vie. Mais je conçois que cette manière de voir les choses soit difficile à admettre à une époque où l'idéal est plutôt l'éphémère et le transitoire.

- Impliquer les laïcs : c'est en effet déjà le cas. Mais c'est mal fait, et pas suffisamment.

Globalement, je constate que les commentaires n'abordent pas, ou de manière très indirecte, la question du diaconat. Ce ministère me paraît pourtant très prometteur pour l'avenir, non comme une suppléance du ministère presbytéral, mais comme une approche nouvelle de la question du ministère de l'Eglise.

casilix a dit…

Je n'ai jamais compris comment l'ordination de femmes ou de prêtres mariés pour régler le problème des vocations...si cet "appel" n'est plus aussi reçu qu'avant par les jeunes gens -et ceux pour des raisons d'évolution de la société qui nous touchent tous-, je ne vois pas pourquoi les femmes échapperaient au phénomène et en encore moins les couples...Je ne vois pas comment dans l'égoïsme ambiant on accepterait de partager l'homme de sa vie avec Dieu et toute une communauté...c'est quand même un "boulot" qui requière une disponibilité totale, et ça sous-entend que les 2 conjoints ont reçu le même appel, sinon c'est le couple qui va capoter (moi, je ne m'y vois pas du tout en tous cas!)...Il faut sûrement t se poser la question sur l'ordination des femms et des prêtres mariés...mais sûrement pas dans l'optique d'y trouver la solution aux manque de vocation.

Marc a dit…

J'arrive après la bataille, mais que penses-tu d'une Eglise sur le modèle Africain, avec des prêtres itinérants ?

Je m'avance sur un terrain mouvant, je ne connais pas personnellement la situation africaine, mais j'ai souvent lu que dans certains Diocèses, le prêtre se déplace d'un village à l'autre, il y reste quelques jours, puis il revient un mois plus tard.

Bref, il n'est plus "attaché" à une communauté.

Toi qui connaît un peu l'Afrique, tu pense que cela peut être une solution ?

Emmanuel Pic a dit…

@ Marc :
je pense qu'en Afrique, il y a autant de manières de faire que de conférences épiscopales ! Pour la situation que je connais (RDC) : les prêtres restent attachés à une paroisse. Mais les paroisses sont immenses, et ils vivent par équipes de trois ou quatre, ce qui, ajouté aux difficultés de communications, donne à leur ministère ce caractère davantage itinérant que le nôtre.

Je crois savoir que c'est quelque chose comme ça que l'évêque de Saint-Etienne envisage chez lui. Personnellement, je suis assez circonspect : cela risque de réduire le ministère à la célébration des sacrements. Or le prêtre, c'est celui qui préside à l'Eglise et à sa croissance. Si la présidence de l'eucharistie n'est plus liée à cette présidence ecclésiale, cela pose problème.

Anonyme a dit…

Le diaconat permanent est parfois présenté comme "ministèe du seuil", le diacre étant témoin du Christ serviteur dans le monde (dans son travail notament). Il pourrait alors permettre aux personnes loin de l'Eglise de se poser tout simplement la question de Dieu. Je ne pense pas qu'il faille penser le diaconat permanent comme une alternative au manque de prêtres. Mais peut-être que la présence d'un diacre portera du fruit par les vocations qu'elles pourrait éveiller. Combien de jeunes sont sans doute appelés par le Seigneur et ne le savent pas, ne l'entendent pas?