mardi 23 mars 2010

Petite visite à des paroissiens.


Un curé, ça s'intéresse à ses paroissiens. Celui-là a dix-sept ans, il fait la manche. Une rapide conversation donne une idée de l'étendue du problème : il vit avec sa mère, sa sœur et son petit frère de deux ans et quelques mois dans une chambre vaguement chauffée au bois. Sa maîtrise du français étant assez rudimentaire, une visite sur place s'impose et permet de parler un peu avec la maman.

Elle semble toute jeune, mais elle a eu sept enfants. Il ne lui en reste que six, car elle a perdu l'un d'entre eux. Quand je dis "perdu", c'est à prendre au pied de la lettre : il a disparu, un jour, quelque part sur une route de Pologne ; il avait deux ou trois ans. A la naissance du petit dernier, elle a touché les allocs ; quelqu'un (qui ?) l'a dénoncée, et elle a été jetée en prison où elle a attendu trois mois avant que lui soit rendue une ordonnance de non-lieu, vu qu'elle avait en effet le droit de percevoir les sous de la sécu. Elle vit depuis dans l'espoir que justice va lui être rendue pour le préjudice qu'elle a subi.

Ils font partie de la face cachée de notre bonheur d'Européens : ni Français, ni immigrés, ils sont des Roms, une portion de cet ensemble que la France regroupe sous l'appellation générique de "gens du voyage". Des nomades, qui n'ont pas même le droit d'avoir une carte d'identité, n'ont pas le droit de vote, et sont considérés comme des parias partout où ils passent.

La semaine prochaine, ils devraient être mis dehors de leur chambre. Je vous tiendrai au courant.

Citoyens à part entière : site du CCFD consacré aux Roms.
European Roma rights center : un site consacré aux droits des Roms en Europe.
Un texte du Vatican sur les Gens du Voyage

4 commentaires:

Natalia Trouiller a dit…

Merci pour ce billet. L'autre jour, j'entendais un évêque dire à la radio "ne donnez pas aux gens du voyage, vous entretenez la mafia"... Evidemment que les choses sont complexes. Mais ce genre d'attitude a tendance à nous dédouanner de nos resposabilités vis-à-vis de nos frères Roms.

AncillaDomini a dit…

N'y a-t-il pas une association ou un organisme social à Dijon qui puisse s'occuper de la partie "arrangements et paperasserie" ?
Je pose la question parce que je connais une Roumaine (dans ma grande ville^^) qui a pu quitter sa caravane et emménager dans un logement (par un organisme social ? une association ? je ne sais plus) deux pièces dont elle n'a pas à payer le loyer mais seulement les charges et la caution d'entrée. Ce n'est pas assez pour cesser de faire la manche, mais c'est mieux que d'être dehors avec trois filles.
Quelque chose à chercher de ce côté-là peut-être ?

AncillaDomini a dit…

"Ne donnez pas... vous entretenez la mafia."
Oui et non. On peut repérer si ce sont les mêmes qui sont au même endroit toute la journée, engager la conversation, se connaître un peu, essayer de savoir. On n'est jamais sûr de ne pas se tromper, mais ça limite les risques... et puis j'aime mieux la partie discussion. ;-)

Emmanuel Pic a dit…

Oui les choses sont complexes... Mais quand cent personnes sont hébergées dans des conditions catastrophiques dans une ancienne caserne, qu'il y a là-dedans des enfants, on ne peut pas se contenter de parler de mafia. Je trouve catastrophique ce qu'a dit cet évêque, qui a dû oublier les écrits de Benoît XVI, les interventions de ses collègues français et l'existence d'une aumônerie des gens du voyage. Bref.