Refoulements.
De temps en temps, je reçois des visites peu ordinaires.
Je n'oublierai pas cette femme, venue me voir parce qu'elle avait été envoûtée. Au départ, rien que de l'anodin : désespérément amoureuse d'un homme, elle avait eu recours au service d'un sorcier pour attirer l'attention de l'être aimé. Classiquement, il avait fallu procurer une photo, sur laquelle on avait procédé aux charmes ordinaires. Ceux-ci ne s'étant pas révélé efficaces, on était passé aux pommades : la cliente dut s'enduire d'une mixture douteuse, puis le mage avait proposé de procéder lui-même à l'opération, et de là on était passé à des relations plus intimes. Le tout bien sûr accompagné de sommes d'argent non négligeable.
Un jour, la dame en eut marre. Elle décida de déchirer la photo du mage et de jeter toute sa correspondance à la poubelle. Ce geste de liberté l'empêcha de dormir toute la nuit. La mage, à qui elle crut bon d'avouer sa faute pour retrouver la paix, lui promit de terribles représailles des démons qu'on avait inutilement sollicités. C'est dans cet état d'esprit qu'elle vint me voir. Précisons que la dame était blanche et quelle habitait en ville.
La sorcellerie est une réalité chez nous ; elle est pratiquée par des gens comme vous et moi, qui y consacrent beaucoup d'argent (son chiffre d'affaires est, paraît-il, supérieur à celui de la médecine générale). Rébouteux, guérisseurs et voyants de tous poils encombrent les colonnes des petites annonces des journaux. On n'en parle jamais ; mais tout le monde a une histoire de ce genre à raconter.
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