mardi 8 septembre 2009

Dieu et l'argent.

On dit qu'ils n'ont jamais fait bon ménage. On se méfie des religieux quand ils se mêlent d'économie. On ne prête qu'une oreille distraite à Benoît XVI lorsqu'il publie son encyclique sociale (il est vrai que, parue en plein été, elle avait toutes les chances de passer inaperçue, ah le Vatican et la com décidément...). Et voilà qu'une nouvelle, en provenance inattendue des pays du Moyen-Orient, oblige à se remuer les méninges : les actifs des cent plus grandes banques islamiques mondiales ont augmenté cette année de 66 % (les autres se sont contentées d'un modeste 13%).

Une banque islamique, c'est une banque qui applique strictement les interdits coraniques en matière économique : pas de prêt à intérêt (mais une participation aux bénéfices pour celui qui investit), pas de spéculation, et j'en passe. Il y a trente ans, on n'aurait pas parié un kopec sur ce genre de truc.

Loin de moi l'idée de faire l'apologie du communautarisme, et encore moins du Coran. Je ne suis pas non plus naïf au point d'ignorer les effets de la hausse du pétrole sur cette bonne tenue. Je sais enfin qu'il n'y a pas d'économie chrétienne, alors qu'il y a une finance islamique. Mais quand je lis chez Benoît XVI et sous la plume des évêques de France un appel à moraliser les comportements des acteurs économiques, et l'affirmation que la morale n'est pas incompatible, au contraire, avec la création de richesses, je me dis que nos cousins appliquent avec intelligence des conseils prodigués depuis longtemps par l'Eglise. Et que, peut-être, enfin si j'étais banquier, j'essayerais de me lancer dans une activité, disons, conforme à ces conseils, et je le ferais savoir.

Si par hasard vous n'êtes pas convaincu, et si vous n'avez pas trop sommeil, voici ce qu'en dit la ministre des finances française... Ca vaut son pesant de capitalisme.

9 commentaires:

AncillaDomini a dit…

C'est juste une idée en l'air, pas très bien fondée... mais n'est-ce pas ce que fait (entre autres) l'Opus Dei ?

do a dit…

Le premier qui ouvre une banque ou une assurance qui respecte les principes chrétiens, qu'il le dise, j'adhère illico. (bon, j'ai pas d'argent, mais enfin...)

Anonyme a dit…

Je tombe par hasard sur votre blog et j'aimerais m'y abonner, mais cela ne semble pas possible car la fonction "abonnez vous..." est inerte!

Bien fraternellement en Jésus Christ

Je suis artiste chrétien et j'ai un blog à l'adresse suivante

http://robertempain.blogspot.com/

emmanuel pic a dit…

@ Robert
chez moi ça marche...

Hub a dit…

Bonjour,

Je ne suis pas un spécialiste mais je m'étais quand même un peu penché sur la question de la finance islamique à une époque pour un client.

Les contrats sont halal, c'est à dire visés par un imam. Ceci mis à part, c'est très très proche de la finance occidentale classique. Les bons résultats des banques "islamiques" sont probablement le fait d'un marketing "agressif" qui pousse de plus en plus de banques locales à proposer et promouvoir ce genre de produits, et de la pression des barbus (+ le pétrole, comme vous le dites).

Cela reste à vérifier, mais c'est mon avis (et seulement cela...).

josephus a dit…

Je suis d'accord avec l'auteur du blog pour dire que le message social du pape n'st pas entendu. Ca n'intéresse pas le monde médiatique. Alors que n'importe quelle parole sur la morale sexuelle est montée en épingle.
Mais je pense cependant que l'Eglise a une part de responsabilité. Si tous les prêtres dans tous leurs sermons, rappelaient à temps et à contretemps, que "le chemin de Dieu passe par l'autre" selon la belle formule de Vincent de Paul, ce message finirait pas être plus audible. Bien sûr, il ne faut pas que parler, il faut agir. L'Eglise devrait constamment mettre en avant cette préoccupation des plus pauvres, de la justice sociale...On a toujours l'impression que l'Eglise a peur qu'on ne dréduise son message à un message social. Mais "qui prétend aimer Dieu et n'aime pas son frère est un menteur" Ce n'est pas moi qui le dit...

Bashô a dit…

Bonjour, je vous lis depuis bien longtemps mais n'ai jamais commenté jusqu'à présent. En lisant votre note, je n'ai pu m'empêcher de penser à l'expérience d'un expat à Dubaï (et depuis revenu en France) et qui connaît bien la finance islamique et en particulier l'envers du décor. Je vous invite à lire sa note qui explique bien les choses et en particulier qu'il faut prendre ses résultats avec des pincettes : http://remi.over-blog.com/article-28242549.html

Emmanuel Pic a dit…

@ Basho : Billet en effet très intéressant. Je ne veux pas dire qu'il faut entrer dans le jeu, un peu hypocrite, de la casuistique qui permet de contourner les interdits religieux en inventant des techniques financières "religieusement propres". Mais que les préoccupations éthiques, non seulement ne sont pas incompatibles avec le profit, mais peuvent être au contraire très profitables, à condition de se situer sur un terme plus long que le très court terme couramment pratiqué par les établissements bancaires.

Bashô a dit…

@ Emmanuel Pic: Tout d'abord vous faites allusion à ces "méchants" spéculateurs qui agissent à "très court terme." Puis-je me permettre de vous rappeler que la crise financière actuelle vient des subprimes et donc de l'immobilier: investissement tout ce qu'il y a de plus traditionnel... Je ne nie pas que le très court terme n'est pas très sain mais il faut faire attention aux jugements moraux hâtifs. Par exemple le problème que soulève le billet auquel j'avais renvoyé n'est pas la manière un peu hypocrite des financiers musulmans mais bien la fragilité intrinsèque de ces banques justement liée à une application de la morale islamique dans le monde financier actuel.

Personnellement, en tant que scientifique, j'ai tendance à me méfier de la morale (ou de l'éthique) non pas per se (nous avons tous besoin de la morale) mais parce qu'elle peut nous aveugler. On peut poser un acte qui nous paraisse bonne en soi mais en réalité profondément pervers (par exemple sauver les dauphins peut conduire à une catastrophe écologique majeure: http://southernfriedscience.com/2009/02/16/the-ecological-disaster-that-is-dolphin-safe-tuna/). Agir de façon réellement juste exige avant tout du discernement, et appliquer à courte terme la morale peut conduire à des conséquences effroyables!